Dirigeants : La Trésorerie, une priorité permanente « Cash is King »

La crise actuelle, à la fois sanitaire et économique, qui frappe toutes nos entreprises d’une manière aussi violente qu’inédite, nous rappelle l’importance cruciale de la Trésorerie (« Cash is King »), et par là même, l’impérieuse nécessité de son pilotage au plus haut niveau de l’entreprise. 

 

La Trésorerie doit être un élément clé du tableau de bord du dirigeant ; et ce au même titre que le niveau du carnet de commandes, les stocks, les ratios de rentabilité ou les données sur les ressources humaines.

 

Concrètement, la Trésorerie doit faire l’objet d’une gestion précise, régulière et pro active

 

Selon la taille de l’entreprise, cette gestion peut être dévolue à une équipe spécifique (DAF, comptabilité) mais dont la résultante : la position de Trésorerie de l’entreprise (positive ou négative) doit être connue du dirigeant à tout moment et en anticipation

 

En pleine connaissance de la situation, il est alors en mesure de prendre les décisions de gestion qui en découlent. 

 

 

Un outil impératif : Le prévisionnel de Trésorerie

 

Pour avoir cette vision, le dirigeant doit s’appuyer impérativement sur un outil synthétique : le tableau prévisionnel de Trésorerie.

 

Pour être pertinent, ce prévisionnel de Trésorerie doit :

 

  • être réalisé sur une période assez longue prenant en compte le ou les cycles complets d’activités de l’entreprise, soit 12 voire 18 mois
  • être mis à jour régulièrement, avec une périodicité au minimum mensuelle voire hebdomadaire selon la taille, la maturité et le positionnement de l’entreprise
  • prendre en compte l’intégralité des flux de l’entreprise (encaissements et décaissements) qu’ils soient certains ou aléatoires (ex. le chiffre d’affaires), fixes ou variables (ex. les rémunérations commerciales)

 

Véritable outil d’aide à la décision pour le dirigeant, ce tableau prévisionnel doit aussi, et surtout, être simple, compréhensible et clair

 

En particulier il fait ressortir les indicateurs clé (notamment le BFR et ses composantes) qui permettent au dirigeant d’actionner les effets de levier pertinents.

(NB : de nombreux logiciels existent sur le marché – à titre d’exemple Agicap, Spendesk, Cash Force, etc… – , accessibles pour toutes les tailles d’entreprises ; à défaut l’utilisation d’un tableur type Excel peut être suffisant)

 

       

Un indicateur majeur : Le Besoin en Fonds de Roulement (BFR)

 

La position de Trésorerie (positive ou négative) de l’entreprise découle directement de la différence entre son fonds de roulement (FR = différence entre ressources stables et actifs immobilisés) et son besoin en fonds de roulement (BFR = besoins pour l’exploitation au quotidien).

 

Le Besoin en Fonds de Roulement est un indicateur avancé de la santé de l’entreprise ; plus que son niveau intrinsèque, c’est davantage son évolution qui doit préoccuper le dirigeant

 

En effet, selon le niveau et l’évolution anticipée du Besoin en Fonds de Roulement, le dirigeant a des décisions de gestion à prendre (exemples) :

 

  • anticiper le recours à des  découverts / financements bancaires (dans le cas où le BFR progresse entraînant une position de Trésorerie négative)
  • optimiser les gains financiers (dans le cas où le BFR connait une évolution décroissante entraînant une position excédentaire en Trésorerie)
  • mettre en œuvre des actions de réduction du BFR (dans le cas où l’évolution devient trop marquée risquant de stopper le bon développement de l’entreprise)

 

 

Trois composantes clé : poste Clients, Masse salariale, poste Fournisseurs 

 

Dans le cadre du suivi de cet indicateur majeur (BFR), il nous semble important d’insister sur trois composantes clé, devant faire l’objet d’une gestion précise, régulière et pro-active

 

1- Poste Clients

Le dirigeant doit s’assurer du suivi rigoureux des créances clients, notamment sur 2 facettes essentielles impactant la Trésorerie, voire les équilibres financiers de l’entreprise : 

 

  • le strict respect par les clients des délais de paiement contractuels 
  • la solvabilité des clients (ce point est trop souvent la cause de difficultés graves pour l’entreprise) 

    

2- Masse salariale 

La Masse salariale (salaires + cotisations sociales) est bien souvent le premier poste de dépenses de l’entreprise ; l’enjeu de son pilotage est donc crucial sur la Trésorerie : 

 

  • revue mensuelle des effectifs en globalité, y compris recrutements prévus, actés, en cours d’arrivée et 
  • Intérimaires (même si en traitement comptable ces derniers n’entrent pas dans la masse salariale)
  • prise en compte de l’inertie entre moment de décision et impact constaté (cf. code du travail)

 

3- Poste Fournisseurs

Le calendrier des paiements à effectuer par l’entreprise auprès des différents fournisseurs doit faire l’objet d’un suivi précis permettant au dirigeant la prise de décisions pro-actives :

 

  • paiement anticipé de certains fournisseurs moyennant remise / escompte (si trésorerie excédentaire)
  • négociation de délais de paiement supplémentaires (si trésorerie tendue) 
  • passation (ou non) de nouvelles commandes versus niveau des stocks

 

Bien entendu d’autres facteurs influencent la gestion de la Trésorerie, qui dans certains cadres devient un exercice beaucoup plus complexe. C’est le cas notamment dans le cadre d’entreprises de taille significative (couverture des risques de taux), opérant sur plusieurs pays (gestion multi-devises et risque de change) ou de groupe (consolidation de la trésorerie maison-mère/filiales).

 

 

La Trésorerie : une composante stratégique, responsabilité permanente du dirigeant

 

Quelle que soit l’entreprise, sa taille, sa stratégie et sa structure financière, l’expression « Cash is King » est pleinement d’actualité dans le contexte de crise que nous subissons depuis plusieurs semaines. 

 

C’est bien ce « Cash » qui permet de passer le cap de la situation actuelle et qui permettra le rebond de sortie de crise.

 

Les dirigeants sont d’ailleurs actuellement pleinement mobilisés sur le sujet (mise en œuvre de plans de continuité, négociations et reports d’échéances, mise en activité partielle de toute ou partie des équipes, demandes de crédits de trésorerie, etc…) avec l’aide des institutions politiques et financières qui mettent en place des dispositifs massifs d’injection de liquidités, d’un niveau inégalé.

 

Toutefois, la Trésorerie ne doit pas être une préoccupation ponctuelle, de court terme, ni l’apanage d’une équipe de spécialistes, dans un service comptable et financier. 

 

Elle est bien, au centre du fonctionnement de l’entreprise, de manière permanente et sur le long terme. 

 

A ce titre la Trésorerie est à considérer comme une des composantes stratégiques de l’entreprise, et donc au cœur des responsabilités et préoccupations du dirigeant.

 

 

Jean-Philippe Martin

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